Une expérience H²O originale a vu le jour à Caen ce mercredi 22 mars 2017 à l’occasion de la journée mondiale de l’eau. Un serious game, c’est-à-dire un jeu ayant une intention pédagogique, qui souhaite apprendre aux joueurs à préserver l’eau. Un projet naît d’une commande de l’Agence de l’Eau Seine-Normandie en partenariat avec la société Aslak Studio. Le jeu s’intitule IAO, ce qui signifie « eau » en patois normand.
L’histoire du jeu est la suivante : en 2077, les réserves d’eau de la planète sont quasiment épuisées. Les deux héros, Aby et Nox retournent alors dans le passé pour comprendre comment cela est arrivé et tenter de sauver la terre.
J’ai eu l’occasion d’échanger avec Fanny et Vincent ( Vuturavapeur ), les deux artistes qui ont donné leur visage et costumes aux héros du jeu.
Fanny est comédienne et costumière. Vincent est accessoiriste et décorateur.
Leur collaboration avec l’Agence de l’Eau a débuté l’an passé dans le cadre du festival normand, « Cidre et Dragons ». Pour cette occasion, l’Agence de l’Eau, qui y tenait un stand, les a sollicité pour l’adapter à l’univers du festival. Ils choisissent le style steampunk et fabriquent costumes, accessoires et décorations pour le lieu. Le steampunk s’appuie sur notre histoire en imaginant comment un élément ou un choix qui aurait été fait différemment aurait pu changer le cours des choses et donc notre monde tel que nous le connaissons aujourd’hui.
Suite à ce festival, l’Agence de l’Eau leur propose de prendre part à leur nouveau projet, une application qui souhaite apprendre aux joueurs à préserver l’eau. L’aventure commence…
Avant de découvrir ce projet, Fanny et Vincent étaient déjà très sensibles à cette problématique environnementale. Pour Fanny, la question de l’eau revient assez souvent dans son travail. Elle cite en particulier une création scénique à destination des écoles autour de cette thématique et dans laquelle elle fût comédienne.
Lorsque je leur demande avec naïveté pourquoi avoir fait le choix du post apocalyptique pour cette application, Vincent me répond avec humour et sérieux « On y va ! On se prépare ! » C’est un parti pris qui exprime ce « pessimisme qui devient le nôtre ». Il définit de la façon suivante le post apocalyptique : « Suite à une catastrophe qu’elle soit d’ordre nucléaire, environnementale… Les personnes doivent reconstruire une société sur les cendres. »
Au-delà de l’esthétisme et de l’histoire, c’est aussi pour eux un choix écologique. Les décors, accessoires, costumes qu’ils conçoivent et fabriquent sont réalisés à partir d’éléments de récupération. Pour Vincent, il s’agit de « transformer les déchets en œuvre d’art ».
L’Agence de l’Eau avait une idée centrale, « apprendre à économiser l’eau », mais elle a laissé les différents artistes travailler sur l’esthétique.
Concernant l’écriture du scénario, ce rôle fût confié à Ansk studio et à Eloïse qui est, entre autres, libraire ambulante ( l’imaginarium d’Eloïse ). Fanny et Vincent soulignent le fait que l’application n’est pas à vocation moralisatrice mais qu’elle souhaite au contraire, « montrer ce qui est bien, ce que l’on peut faire ». L’écriture s’est appuyée sur les personnages, l’univers et les lieux qui ont été choisi en amont et photographié par l’artiste Massden. Il aura fallu environ 500 jours de travail pour réaliser cette application.
Il sera possible de retrouver nos héros lors de divers festivals dans lesquels l’Agence de l’Eau prévoit d’être présente ; le festival appellation d’origine contrôlée ( 14 ), Beauregard ( 14 ) Rast Art, ( 14 ), les Papillons de nuit ( 50 ), les Traversées Tatihou ( 50 ), les Hétéroclites ( 50 ), Art sonic ( 61 ) et Cidre et Dragons ( 14 ). Les deux artistes déambuleront en costume auprès des festivaliers. Sur le stand, une exposition des photographies réalisées par Massden sera à découvrir ainsi que l’application. Une façon de faire perdurer ce projet et de rendre compte d’avantage encore du travail artistique qui a été nécessaire pour le mener à bien.
© Massden
Alors évidemment, il fallait l’essayer ! On se laisse prendre par la musique de Masden et par l’univers de science-fiction du jeu que les photographies et l’interface rendent efficacement. En revanche, nous avons le sentiment que l’interaction avec les joueurs qui nous demandent conseil est artificielle, c’est-à-dire qu’elle n’influence pas le cours de l’histoire. Un seul scénario semble être défini peu importe nos choix.
Par ailleurs, comme le soulignait Vincent, nous n’avons pas le sentiment d’une stratégie moralisatrice mais bien d’un jeu qui nous invite à découvrir les problématiques liées à l’eau, les actions et infrastructures qui existent pour protéger cette ressource. Le choix de la science-fiction semble participer à ce sentiment, nous ne sommes pas encore responsables de ce drame qui n’a pas encore eu lieu. Nous aidons les personnages, donc nous agissons pour préserver cette ressource.
D’autre part, la narration nous propose parfois d’interagir de façon humoristique avec les personnages et nous sommes bien entendu tenté de suivre cette voie !
Concernant le média utilisé pour sensibiliser, l’application est un concept intéressant au vue de l’évolution des pratiques.
Pour télécharger l’application, qui est par ailleurs gratuite, c’est par ici !